Strikes in France from 5 Dec. - disruption of the rail infrastructure 03/12/19

< Zurück

La grève du 5 décembre à la SNCF peut-elle durer jusqu’à Noël?

Durer pour faire plier le gouvernement mais risquer de perdre le soutien populaire.

Pour les syndicats, le dilemme du "décembre noir" est posé.

 

Gare de Lyon à

AFPGare de Lyon à Paris

TRANSPORTS - C’est acté, la journée s’annonce noire. Le jeudi 5 décembre sera très très compliqué dans les transports. Cette date n’a pas été choisie au hasard par les organisations syndicales, puisqu’elle se déroule 24 ans jour pour jour après le grand mouvement de 1995 contre la réforme Juppé dans laquelle il était déjà question d’aligner les régimes spéciaux de retraites sur le régime général. À l’époque, la puissante mobilisation avait duré trois semaines. Un tel scénario est-il possible dans la configuration actuelle? Pour certains usagers qui souhaiteraient prendre des billets de train à Noël, des inquiétudes commencent à poindre…

Dans leur communiqué unitaire, CGT, UNSA et Sud-Rail annoncent que le préavis sera reconductible toutes les 24 heures, ce qui suppose l’organisation d’une assemblée générale pour décider chaque jour de la suite du mouvement. Contrairement à la grève dite perlée du printemps 2018 qui permettait dans une certaine mesure de s’organiser à l’avance, les 24 heures reconductibles laissent moins de marges d’anticipation aux usagers.

Contactée par Le HuffPost, la SNCF explique n’avoir en l’état qu’une visibilité réduite: “On sera en mesure de communiquer le plan de transport le 3 décembre, parce qu’on aura alors tous les préavis de grève et qu’on pourra clairement avoir une vision de la mobilisation”. Pour autant, l’entreprise ferroviaire explique se préparer à tous les scénarios. Les mesures commerciales seront à cet égard possibles dès mardi. “Les personnes dont les trains seront annulés ou supprimés seront évidemment contactées par mails ou SMS avant”, assure également la SNCF.

Un point sera fait tous les jours à 17 heures concernant les perturbations des deux jours suivant.

Pour devancer les désagréments, l’entreprise ferroviaire a également choisi cette semaine de bloquer la vente de billets TGV, TER et Intercités sur la plateforme Oui.SNCF. Et ce sur plusieurs jours. Objectif, permettre à ceux qui ont déjà acheté un billet pour un train qui ne circulera pas de pouvoir accéder plus facilement à un train dont la circulation est assurée. 150.000 voyageurs ont déjà été prévenus.

Des syndicats déterminés...

Du côté des syndicats, il est certain que les convergences autour du 5 décembre ont renforcé le moral des troupes. Et à quelques jours d’une mobilisation qu’ils espèrent forte, il n’est évidemment pas question de montrer des faiblesses. “Pour nous partir en grève, c’est un échec, ce n’est pas dans notre ADN. Mais nous n’avons pas le choix, nous avons fait quatre réunions qui n’ont abouti absolument à rien. Les réformes ferroviaires s’enchaînent depuis cinq ans, cette réforme c’est la goutte de trop alors que nous avons beaucoup lâché. Nous sommes déterminés et de fait les conditions pour un mouvement durable sont réunies”, estime Didier Mathis, secrétaire général de l’UNSA ferroviaire, contacté par Le HuffPost.

Pour autant, ce dernier refuse d’évoquer une poursuite jusqu’à Noël, tout comme Philippe Martinez, qui interrogé par Sud Radio, le 13 novembre dernier avait simplement dit: “Nous, on appelle à ce que, partout où c’est possible, les grèves soient reconduites, mais après c’est toujours les salariés qui décident”. Des précautions également prises par FO Cheminots et son secrétaire général. Dans l’Express, Philippe Herbeck, mise sur un mouvement massif le 5 et les jours qui suivront pour faire céder, assez vite, le gouvernement. “Le but n’est pas d’aller jusqu’à Noël”, assure-t-il.

“Décembre noir”

Un son cloche légèrement différent pour Sud-Rail, où certains n’hésitent pas à parler d’un mois de décembre “noir”. “Les mouvements sociaux très suivis et très forts ne durent pas six mois. Chez nous ça commence à parler de “Black december”, ça durera peut-être jusqu’au 31 décembre mais c’est vrai qu’au-delà de trois semaines il sera difficile de continuer”, analyse Bruno Poncet, secrétaire fédéral de Sud-Rail, voyant dans la réforme des retraites “l’étincelle qui peut faire partir le foyer”.

Selon le militant syndical, pour éviter un mouvement durable les usagers doivent se mobiliser également. “On ne se bat pas que pour nous, mais pour tout le monde, pour une meilleure répartition des richesses. À retraite universelle, combat universel”, ajoute-t-il tout en assurant que des salariés qui ne se mobilisaient pas avant sont désormais prêts à se mettre en grève.

Bruno Poncet mise d’ailleurs sur l’opinion publique, plutôt à raison pour l’instant. Un sondage BVA pour La Tribune, Orange et RTL publié le 14 novembre indiquent que 60% des Français soutiennent le mouvement de grève décembre. Ils sont également 70% à penser que la mobilisation devrait s’inscrire dans la durée.

L’exécutif anticipe

De l’avis de tous les syndicats contactés, le seul moyen pour mettre un terme à la mobilisation est que le gouvernement recule sur la réforme. Pas sûr que cela soit au programme. “Je veux aller au bout de cette réforme [...] Peut-être que ça me rendra impopulaire, peut-être que des gens diront ‘c’est insupportable, tout ça pour ça’. Je ferai tout pour qu’il n’y ait pas ces blocages, je ferai tout pour qu’on soit en soutien de nos compatriotes qui seraient bloqués, mais je n’aurai aucune forme de faiblesse ou de complaisance”, a déclaré il y a quelques semaines Emmanuel Macron sur RTL.

Pour autant, le gouvernement se prépare lui à une grève d’au moins quelques jours. “Nous préparons bien sûr le plan de transports pour le 5, le 6, le 7, le 8, bref les jours possibles de grève, de manière à faciliter le transport des Français, et nous serons très vigilants sur les aspects d’ordre public”, a fait savoir le secrétaire d’État aux Transports Jean-Baptiste Djebbari, sur BFMTV, sans détailler ce “plan”.

Si tabler sur une grève pendant la période de Noël paraît donc en l’état plutôt ambitieuse côté syndicat, il est fort probable que pour les usagers les perturbations durent une semaine, soit jusqu’au 15 décembre. En cause des réunions menées secteurs par secteur par Jean-Paul Delevoye avec les syndicats, les 10, 12 et 15 décembre.

D’ici là les usagers s’organisent déjà, contacté par Le Parisien, Flixbus indique avoir enregistré une hausse de 70% de la demande par rapport à la même période d’il y a un an.

Oben